Le Parlement exige la protection des travailleurs de l’économie collaborative

Les cyclistes Deliveroo ont envahi les rues des capitales européennes pour livrer des repas. [Jon Crel/Flickr]

Les eurodéputés veulent que l’UE et les autorités nationales assurent la protection juridique et sociale des travailleurs de l’économie collaborative, souvent en situation précaire.

La proposition du Parlement européen regrette les orientations sur l’économie collaborative, publiées l’an dernier par la Commission européenne, qui ne sont pas suffisamment claires sur la manière dont les lois européennes devraient s’appliquer dans ce nouveau secteur.

Dans son rapport qui doit être adopté le 15 juin, le Parlement demande donc aux États membres de « fournir une clarté légale » et de réglementer les start-ups fondées sur ce modèle.

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La Commission souhaite distinguer les plateformes collaboratives qui offrent un service, comme Uber ou Airbnb. Elle propose ainsi une approche globalement bienveillante.

« Nous devons avancer une stratégie commune, au niveau européen, qui puisse allier marché du travail juste et un éventail partagé de principes légaux et de protection sociale », estime le rapporteur Nicola Danti (S&D, Italie).

Protection sociale

L’économie collaborative, aussi appelée économie de partage, se fonde sur des transactions de pair à pair, passant principalement par des plateformes numériques. Les revenus bruts de ces plateformes sont estimés à 28 milliards d’euros pour 2015. La Commission estime que ces services pourraient ajouter entre 160 et 572 milliards d’euros à l’économie européenne dans les années à venir.

Mais l’Europe a du mal à gérer la montée en puissance de ces nouveaux acteurs, qui perturbent certains secteurs traditionnels comme l’hôtellerie ou le transport, et dont la marge de manœuvre est souvent réduite par les réglementations locales.

Résultat, le labyrinthe administratif qu’affrontent ces nouvelles entreprises en Europe a un impact sur leur développement et la protection des consommateurs, dénoncent les élus européens.

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Emplois précaires

Le projet de rapport envisage l’économie collaborative d’un point de vue positif puisqu’elle « joue un rôle important pour rendre le système économique non seulement plus efficace, mais aussi plus socialement et écologiquement durable, en permettant une meilleure attribution des ressources et des actifs qui seraient sinon sous-utilisés ».

Les eurodéputés s’inquiètent notamment de la situation précaire des conducteurs ou cyclistes livreurs, car ces derniers n’ont généralement pas de protection sociale et sont privés de certains de leurs droits.

Le rapport reconnaît que ce modèle d’entreprise émergent offre aux jeunes et aux groupes marginalisés plusieurs moyens d’entrer sur le marché du travail. Il souligne toutefois que la flexibilité de ces nouvelles formes d’emploi doit être équilibrée par une sécurité économique et sociale pour les travailleurs.

Les eurodéputés soulignent « l’importance capitale » de la sauvegarde des droits des travailleurs dans l’économie collaborative, notamment le droit à la grève ou à la négociation collective.

Le texte souligne aussi que la classification des travailleurs en tant qu’employés ou indépendants, « repose sur la primauté des faits ».

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Les sociétés de l’économie collaborative, comme Uber, qualifient leurs travailleurs d’indépendants pour éviter les coûts de protection sociale. Cependant, lors d’une affaire devenue historique, un tribunal britannique a jugé en octobre dernier que la société, basée à San Francisco, devait considérer ses chauffeurs comme de véritables employés, et donc leur garantir un salaire minimum et des congés payés.

Néanmoins, des responsables reconnaissent qu’il est difficile de progresser sur la protection des droits des travailleurs de l’économie collaborative puisque cette compétence est du ressort des États membres.

L’exécutif européen envisage d’élargir la portée de lois déjà existantes pour garantir une protection efficace des travailleurs à l’ère du numérique. La Commission souhaite donc proposer une révision de la directive d’ici à la fin de l’année.

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Droits fondamentaux

L’exécutif compte procéder à une révision approfondie de la directive afin d’y intégrer des droits minimums pour les travailleurs en question.

Les droits fondamentaux du travail identifiés par la Commission comprennent une durée maximale de la période d’essai, un contrat avec un minimum d’heures, une formation, un préavis raisonnable en cas de licenciement et un accès à une résolution des différends efficace et impartiale dans le cas de licenciement ou de traitement abusif.

La Commission Juncker consulte également les partenaires sociaux pour élargir l’accès à la protection sociale, pour l’instant non disponible pour les indépendants et les emplois atypiques. L’objectif est d’explorer des moyens de garantir que chaque travailleur a accès à la protection sociale sur la base de sa contribution, ont expliqué des responsables européens.

 

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